Abrégé de l'Histoire Générale des Voyages (Tome 6) (Illustrated)
Nous continuons de parcourir les dépendances du Mogol situées dans la partie occidentale, retournant sur nos pas du Coromandel à la côte du Malabar, et nous allons suivre le voyageur Mandelslo dans le Guzarate, à Cambaye et à Visapour, avant d'entrer dans l'intérieur de l'empire mogol, proprement nommé l'Indoustan.

On nous représente Mandelslo comme un de ces voyageurs extraordinaires dans qui le désir de parcourir le globe de la terre est une passion, et qui lui sacrifient jusqu'à l'espérance de leur fortune. Il était né d'une famille distinguée dans le duché de Mecklembourg; et dès l'enfance il avait été page du duc de Holstein. Ce prince ayant pris la résolution d'envoyer une ambassade en Moscovie et en Perse, le jeune Mandelslo marqua tant d'empressement pour visiter des régions si peu connues dans sa patrie, qu'il obtint la permission, non-seulement de faire ce voyage à la suite des ambassadeurs, en qualité de gentilhomme de la chambre du duc, mais encore de se détacher de l'ambassade aussitôt que la négociation serait terminée en Perse, et d'exécuter le dessein qu'il avait de visiter le reste de l'Asie.

Il s'embarqua le 6 avril 1638, à Bender-Abassi, sur un navire anglais de trois cents tonneaux et de vingt-quatre pièces de canon, avec deux marchands anglais nommé Hall et Mandley, que le président du comptoir de Surate faisait venir d'Ispahan pour les affaires de leur compagnie. Nous passerons les détails de sa route pour le transporter tout de suite dans le Guzarate.

Amedabad, capitale de ce royaume, est située à 23 degrés 32 minutes nord, à dix-huit lieues de Cambaye, et quarante-cinq de Surate, sur une petite rivière qui se perd dans l'Indus à peu de distance de ses murs. Cette ville est grande et bien peuplée. Sa circonférence est d'environ sept lieues, en y comprenant les faubourgs et quelques villages qui en font partie. Ses murs sont fort larges, ses édifices ont un air étonnant de grandeur et de magnificence, surtout les mosquées et le palais du gouverneur de la province. On y fait une garde continuelle, et la garnison est considérable, par la crainte où on est des Badoures, peuples éloignés d'environ vingt-cinq lieues, qui ne reconnaissent point l'autorité du Mogol, et qui se font redouter de ses sujets par leurs incursions.

L'Asie n'a presque point de nation ni de marchandises qu'on ne trouve dans Amedabad. Il s'y fait particulièrement une prodigieuse quantité d'étoffes de soie et de coton. À la vérité, les ouvriers emploient rarement la soie du pays, et moins encore celle de Perse, qui est trop grosse et trop chère; mais ils se servent de soies chinoises, qui sont très-fines, en les mêlant avec celle du Bengale, qui ne l'est pas tant, quoiqu'elle le soit plus que celle de Perse. Ils font aussi des brocarts d'or et d'argent; mais ils y mêlent trop de clinquant, ce qui les rend fort inférieurs à ceux de Perse. Depuis que Mandelslo était arrivé à Surate, ils avaient commencé à fabriquer une nouvelle étoffe de soie et de coton à fleurs d'or, qu'on estimait beaucoup, et qui se vendait cinq écus l'aune: mais l'usage en était défendu aux habitans du pays, et l'empereur se l'était réservé, en permettant néanmoins aux étrangers d'en transporter hors de ses états. On faisait librement dans les manufactures d'Amedabad toutes sortes de satins et des velours de toutes couleurs; du taffetas, du satin à doubler, de fil et de soie; des alcatifs ou des tapis à fond d'or, de soie et de laine, moins bons à la vérité que ceux de Perse, et toutes sortes de toiles de coton.

Les autres marchandises qui s'y vendent le plus, sont le sucre candi, la cassonade, le cumin, le miel, la gomme laque, l'opium, le borax, le gingembre sec et confit, les mirobolans, et toutes sortes de confitures; le salpêtre, le sel ammoniac et l'indigo, qui n'y est connu que sous le nom d'anil, et que la nature y produit en grande abondance. On y trouve aussi des diamans; mais, comme on les y porte de Golconde et de Visapour, on peut les avoir ailleurs à moindre prix. Le musc et l'ambre gris n'y sont pas des marchandises rares, quoique le pays n'en produise point.

Un commerce des plus considérables d'Amedabad, est celui du change. Les banians font des traites et des remises pour toutes les parties de l'Asie, et jusqu'à Constantinople; ils y trouvent d'autant plus d'avantages, que,
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Abrégé de l'Histoire Générale des Voyages (Tome 6) (Illustrated)
Nous continuons de parcourir les dépendances du Mogol situées dans la partie occidentale, retournant sur nos pas du Coromandel à la côte du Malabar, et nous allons suivre le voyageur Mandelslo dans le Guzarate, à Cambaye et à Visapour, avant d'entrer dans l'intérieur de l'empire mogol, proprement nommé l'Indoustan.

On nous représente Mandelslo comme un de ces voyageurs extraordinaires dans qui le désir de parcourir le globe de la terre est une passion, et qui lui sacrifient jusqu'à l'espérance de leur fortune. Il était né d'une famille distinguée dans le duché de Mecklembourg; et dès l'enfance il avait été page du duc de Holstein. Ce prince ayant pris la résolution d'envoyer une ambassade en Moscovie et en Perse, le jeune Mandelslo marqua tant d'empressement pour visiter des régions si peu connues dans sa patrie, qu'il obtint la permission, non-seulement de faire ce voyage à la suite des ambassadeurs, en qualité de gentilhomme de la chambre du duc, mais encore de se détacher de l'ambassade aussitôt que la négociation serait terminée en Perse, et d'exécuter le dessein qu'il avait de visiter le reste de l'Asie.

Il s'embarqua le 6 avril 1638, à Bender-Abassi, sur un navire anglais de trois cents tonneaux et de vingt-quatre pièces de canon, avec deux marchands anglais nommé Hall et Mandley, que le président du comptoir de Surate faisait venir d'Ispahan pour les affaires de leur compagnie. Nous passerons les détails de sa route pour le transporter tout de suite dans le Guzarate.

Amedabad, capitale de ce royaume, est située à 23 degrés 32 minutes nord, à dix-huit lieues de Cambaye, et quarante-cinq de Surate, sur une petite rivière qui se perd dans l'Indus à peu de distance de ses murs. Cette ville est grande et bien peuplée. Sa circonférence est d'environ sept lieues, en y comprenant les faubourgs et quelques villages qui en font partie. Ses murs sont fort larges, ses édifices ont un air étonnant de grandeur et de magnificence, surtout les mosquées et le palais du gouverneur de la province. On y fait une garde continuelle, et la garnison est considérable, par la crainte où on est des Badoures, peuples éloignés d'environ vingt-cinq lieues, qui ne reconnaissent point l'autorité du Mogol, et qui se font redouter de ses sujets par leurs incursions.

L'Asie n'a presque point de nation ni de marchandises qu'on ne trouve dans Amedabad. Il s'y fait particulièrement une prodigieuse quantité d'étoffes de soie et de coton. À la vérité, les ouvriers emploient rarement la soie du pays, et moins encore celle de Perse, qui est trop grosse et trop chère; mais ils se servent de soies chinoises, qui sont très-fines, en les mêlant avec celle du Bengale, qui ne l'est pas tant, quoiqu'elle le soit plus que celle de Perse. Ils font aussi des brocarts d'or et d'argent; mais ils y mêlent trop de clinquant, ce qui les rend fort inférieurs à ceux de Perse. Depuis que Mandelslo était arrivé à Surate, ils avaient commencé à fabriquer une nouvelle étoffe de soie et de coton à fleurs d'or, qu'on estimait beaucoup, et qui se vendait cinq écus l'aune: mais l'usage en était défendu aux habitans du pays, et l'empereur se l'était réservé, en permettant néanmoins aux étrangers d'en transporter hors de ses états. On faisait librement dans les manufactures d'Amedabad toutes sortes de satins et des velours de toutes couleurs; du taffetas, du satin à doubler, de fil et de soie; des alcatifs ou des tapis à fond d'or, de soie et de laine, moins bons à la vérité que ceux de Perse, et toutes sortes de toiles de coton.

Les autres marchandises qui s'y vendent le plus, sont le sucre candi, la cassonade, le cumin, le miel, la gomme laque, l'opium, le borax, le gingembre sec et confit, les mirobolans, et toutes sortes de confitures; le salpêtre, le sel ammoniac et l'indigo, qui n'y est connu que sous le nom d'anil, et que la nature y produit en grande abondance. On y trouve aussi des diamans; mais, comme on les y porte de Golconde et de Visapour, on peut les avoir ailleurs à moindre prix. Le musc et l'ambre gris n'y sont pas des marchandises rares, quoique le pays n'en produise point.

Un commerce des plus considérables d'Amedabad, est celui du change. Les banians font des traites et des remises pour toutes les parties de l'Asie, et jusqu'à Constantinople; ils y trouvent d'autant plus d'avantages, que,
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Abrégé de l'Histoire Générale des Voyages (Tome 6) (Illustrated)

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by Jean-François de La Harpe
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Nous continuons de parcourir les dépendances du Mogol situées dans la partie occidentale, retournant sur nos pas du Coromandel à la côte du Malabar, et nous allons suivre le voyageur Mandelslo dans le Guzarate, à Cambaye et à Visapour, avant d'entrer dans l'intérieur de l'empire mogol, proprement nommé l'Indoustan.

On nous représente Mandelslo comme un de ces voyageurs extraordinaires dans qui le désir de parcourir le globe de la terre est une passion, et qui lui sacrifient jusqu'à l'espérance de leur fortune. Il était né d'une famille distinguée dans le duché de Mecklembourg; et dès l'enfance il avait été page du duc de Holstein. Ce prince ayant pris la résolution d'envoyer une ambassade en Moscovie et en Perse, le jeune Mandelslo marqua tant d'empressement pour visiter des régions si peu connues dans sa patrie, qu'il obtint la permission, non-seulement de faire ce voyage à la suite des ambassadeurs, en qualité de gentilhomme de la chambre du duc, mais encore de se détacher de l'ambassade aussitôt que la négociation serait terminée en Perse, et d'exécuter le dessein qu'il avait de visiter le reste de l'Asie.

Il s'embarqua le 6 avril 1638, à Bender-Abassi, sur un navire anglais de trois cents tonneaux et de vingt-quatre pièces de canon, avec deux marchands anglais nommé Hall et Mandley, que le président du comptoir de Surate faisait venir d'Ispahan pour les affaires de leur compagnie. Nous passerons les détails de sa route pour le transporter tout de suite dans le Guzarate.

Amedabad, capitale de ce royaume, est située à 23 degrés 32 minutes nord, à dix-huit lieues de Cambaye, et quarante-cinq de Surate, sur une petite rivière qui se perd dans l'Indus à peu de distance de ses murs. Cette ville est grande et bien peuplée. Sa circonférence est d'environ sept lieues, en y comprenant les faubourgs et quelques villages qui en font partie. Ses murs sont fort larges, ses édifices ont un air étonnant de grandeur et de magnificence, surtout les mosquées et le palais du gouverneur de la province. On y fait une garde continuelle, et la garnison est considérable, par la crainte où on est des Badoures, peuples éloignés d'environ vingt-cinq lieues, qui ne reconnaissent point l'autorité du Mogol, et qui se font redouter de ses sujets par leurs incursions.

L'Asie n'a presque point de nation ni de marchandises qu'on ne trouve dans Amedabad. Il s'y fait particulièrement une prodigieuse quantité d'étoffes de soie et de coton. À la vérité, les ouvriers emploient rarement la soie du pays, et moins encore celle de Perse, qui est trop grosse et trop chère; mais ils se servent de soies chinoises, qui sont très-fines, en les mêlant avec celle du Bengale, qui ne l'est pas tant, quoiqu'elle le soit plus que celle de Perse. Ils font aussi des brocarts d'or et d'argent; mais ils y mêlent trop de clinquant, ce qui les rend fort inférieurs à ceux de Perse. Depuis que Mandelslo était arrivé à Surate, ils avaient commencé à fabriquer une nouvelle étoffe de soie et de coton à fleurs d'or, qu'on estimait beaucoup, et qui se vendait cinq écus l'aune: mais l'usage en était défendu aux habitans du pays, et l'empereur se l'était réservé, en permettant néanmoins aux étrangers d'en transporter hors de ses états. On faisait librement dans les manufactures d'Amedabad toutes sortes de satins et des velours de toutes couleurs; du taffetas, du satin à doubler, de fil et de soie; des alcatifs ou des tapis à fond d'or, de soie et de laine, moins bons à la vérité que ceux de Perse, et toutes sortes de toiles de coton.

Les autres marchandises qui s'y vendent le plus, sont le sucre candi, la cassonade, le cumin, le miel, la gomme laque, l'opium, le borax, le gingembre sec et confit, les mirobolans, et toutes sortes de confitures; le salpêtre, le sel ammoniac et l'indigo, qui n'y est connu que sous le nom d'anil, et que la nature y produit en grande abondance. On y trouve aussi des diamans; mais, comme on les y porte de Golconde et de Visapour, on peut les avoir ailleurs à moindre prix. Le musc et l'ambre gris n'y sont pas des marchandises rares, quoique le pays n'en produise point.

Un commerce des plus considérables d'Amedabad, est celui du change. Les banians font des traites et des remises pour toutes les parties de l'Asie, et jusqu'à Constantinople; ils y trouvent d'autant plus d'avantages, que,

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BN ID: 2940148227694
Publisher: Lost Leaf Publications
Publication date: 02/02/2014
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Language: French
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